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Connaissez vous réellement le vrai Peter Pan de J.M. Barrie ?
Un samedi pas comme les autres car nous nous intéressons à ce Peter Pan, originel. Celui de son créateur J.M. Barrie.
Remerciements à l'Ecole Normale Supérieure d'Ulm pour son séminaire consacré : Peter Pan a-t-il grandi ?
Alors, que savez-vous du réel Peter Pan ? On vous en parle.
D’abord écrit comme un roman pour adulte, le Peter Pan de James W Barrie intitulé “ The Little White Bird” en 1904 devient une œuvre majeure de la littérature de jeunesse à partir de 1911 sous le titre “Peter and Wendy”. Cette version, aujourd’hui considérée comme la plus connue des histoires de Peter devient progressivement le Peter Pan que nous connaissons. Adapté à de multiples reprises au théâtre, au cinéma, en comédie musicale ou encore en bande dessinée, le personnage de Peter Pan et l’œuvre deviennent une véritable référence populaire dès les années 30 sans jamais se désactualiser.
Roman étonnamment subversif qui relate l’histoire des aventures du personnage de Peter Pan au Neverland accompagné par les enfants perdus, celui-ci trouve racine dans la littérature morale infantile indissociable d’enjeux esthétiques et idéologiques propres. C’est au cœur de l’imaginaire de l’île du jamais “ Neverland” que se structure l’essentiel des aventures de Peter Pan. Véritable lieu clos, Le « Pays du Jamais », espace anamorphique et hostile renvoie à l'esthétique des robinsonnades caractérisées notamment par la prédominance de la nature sur l’homme. Avec ses grottes, ses forêts, ses animaux sauvages, l’œuvre recèle de figures naturelles et bestiaires, éléments relativement communs à bien des œuvres de la littérature de jeunesse.
L’œuvre de William Golding, si elle ne peut certes pas s’apparenter à la littérature de jeunesse, constitue une œuvre majeure traitant de la question de l’enfance et son éducation en lien direct avec son environnement. L’île sauvage, véritable lieu d’épreuve et de mûrissement acquiert, comme dans le roman de Barrie, un rôle essentiel à l’intrigue. Plus généralement, on peut souligner l’importance du motif de l’île dans la littérature éducative du 19e siècle en Grande-Bretagne. Cela peut s’expliquer par le fait que la Grande Bretagne était un grand empire colonialiste et que l’insularité était vue comme un espace mystérieux et particulièrement romanesque. L’œuvre de Barrie, bien qu’antérieure aux problématiques écologiques et animalistes qui émergent aux Etats-Unis au XXe siècle, recèle d’images qui traduisent l’ambivalence de la relation de l’enfance à la nature. Dans ce mini mémoire, nous nous pencherons sur une analyse des paradoxes et dysfonctionnements inhérents à la relation existante entre les enfants perdus et l’île du Neverland.
Déjà dans l’étymologie du nom du personnage de Peter Pan, se cachent une allusion à sa proximité avec son environnement. De même que les enfants perdus vêtus “de peaux d’ours qu’ils ont tué avec leurs propres mains” (P43) ne cessent de renvoyer à un monde sauvage qu’il faut apprivoiser. La surnaturalisation de l’île du Neverland invite les enfants et les lecteurs à se plonger dans une nature sauvage et entière, telle l’arche de Noé. Cette nature semble harmonieuse, même dans ce qu’elle incarne de danger et de mort. En effet, elle parait réintégrer les enfants dans une sphère naturelle, dans laquelle ils doivent s’aventurer, se construire (comme ils construisent la maison de Wendy), se battre, survivre. Les enfants sont intégrés à la chaîne alimentaire en cela qu’ils chassent des proies et sont chassés par des prédateurs.
Néanmoins, cette harmonie est tout de suite biaisée par un malaise présent au sein même de la nature. Ces malaises prennent la forme de métamorphoses et transmutations entre l’humain et l’animal. Cette sphère naturelle n’est pas protectrice et englobante comme on aurait pu le penser, mais bien adultérante, responsabilisante. Elle force le départ.
Peter Pan, une oeuvre écologique ?
Peter Pan est indéniablement une figure végétale. Son appellation évoque la figure mythologie de la divinité Pan (en grec ancien Πάν / Pán, « tout », anciennement « campagnard », selon certains écrits, ou de πάειν / páein, « faire paître »). Véritable divinité de la Nature, protecteur des bergers et des troupeaux,
Peter Pan incarne, selon certains critiques, une figure écologique particulièrement représentative de l’éco-littérature de jeunesse. Toutefois cette identification recèle de paradoxes. Une apparente harmonie semble nouer l’enfance et l’intime nature. Certes, cela correspond à la tradition de la littérature de jeunesse (Pinocchio, etc.), une tradition somme toute romantique qui replace l’enfance dans son environnement originel…Mais l’enfance demeure menacée par cet environnement. A la manière de l’ouvrage de William Golding, Lord of the flies, l’âge de l’enfance captive de l’environnement sauvage reste en sursis.
Un récit sur l'enfance certes mais aussi sur l'animalité.
Une véritable confusion des rôles semble bouleverser la relation existant entre l’enfance et l’animal. Les fonctions attribuées à l’enfant et à l’animal semblent sans cesse interchangeables. L’enfant est tantôt animalisé, décrit avec la plus grande bestialité. Inversement l’animal peut se voir attribuer une vraie éthique et moralité. Cela est notamment observable dans les rapports qu’entretiennent au début du roman, Nana et les parents Darling, décrits tour à tour comme des êtres grotesques allant jusqu’à adopter des comportements animaux ( le père se cache dans la niche du chien).
Cette inversion à l’image de bien d’autres confirme l’idée selon laquelle le lecteur ne parvient plus à savoir qui est qui. Le passage avec le grand oiseau blanc est d’autant plus représentatif de cette interchangeabilité que l’oiseau est nommé par les lost boys « Wendy », chassée par la suite comme une proie à coup de flèches (p.53) : “ Ce n’est pas un oiseau, je crois que c’est une dame”. En outre, métaphores et comparaisons animales sont présentes de manière démultipliée dans le texte, parmi lesquelles on peut citer de façon récurrente l’expression “ Détalés comme des lapins” associées aux enfants dont les actions sont régulièrement empruntes au registre de l’animalité (p.48). Un véritable désenchantement de l’enfance au profit de la survie les réduit à leurs simples instincts naturels. A la manière des enfants du roman de Golding, l’enfance s’en trouve fortement compromise.
Voici pour l'analyse,
Désormais place à la lecture.